dimanche 28 novembre 2010

Endless Boogie

Endless Boogie - Focus Level 2008



Nous sommes à peu près à la moitié du deuxième album d’Endless Boogie quand tout à coup, le vertige. La suée, les hallucinations, les repères qui s’échappent. On l’avait senti venir, comme la tempête avant le cyclone. Dès les premières notes de Full House Head, on a quitté le sol et on s’est retrouvés éjectés d’une voiture sur une route inconnue du Mississippi ou d’Alabama, en pleine nuit.

Du blues-rock, hors des chemins balisés, dans les fossés où se terrent des bêtes grondantes ; électrique jusqu’à la douleur, psychédélique jusqu’à la nausée, comme on n’en avait jamais entendu à jeun. En surface, on dirait parfois les Black Keys, qui auraient perdu les clés et les cherchent dans le noir, parce que leur vie en dépend. Ou les Stooges, si Iggy Pop avait été le bluesman de ses rêves. Ou, le jour de l’apocalypse, un bœuf entre Lynyrd Skynyrd et le Velvet Underground dans un vieux bar à putes.

En profondeur, on dirait de la magie, de la sorcellerie, une musique de transe pour invoquer les esprits tapis au fond des volcans, le meilleur disque entendu depuis des lustres. Les guitares hurlent et hululent, le chanteur est une gueule noire qui remonte fou de la mine, après un coup de grisou. Les chansons sont longues, entre 5 et 22 minutes, hypnotiques et implacables, maudits monolithes qui ricochent à la surface d’un lac de poix.

Ni poses, ni fioritures, ni folklore : pas de drapeau dixie chez Endless Boogie, mais le pavillon noir des pirates terrifiants. Endless Boogie existerait depuis une dizaine d’années et viendrait de Brooklyn, fondé par un type à la mine patibulaire mais presque, réputé pour être un des plus grands collectionneurs de disques de rock psychédélique au monde.

Endless Boogie existe à peine sur internet. Le groupe fait très peu de concerts, en général dans des bars. Du rock psychédélique, Endless Boogie en joue, mais sans le rejouer ni le parodier. Le groupe semble surgi d’une époque primitive, quand tout était plus dur, pur et fort. Des hommes des cavernes qui découvrent le feu électrique sans l’avoir encore apprivoisé, l’adorent et le craignent. De l’art pariétal sur les murs du panthéon psychédélique.

par Stéphane Deschamps - Les Inrocks

Paul Major : Vocals & Guitar
Harry Druzd : Drums
Jesper Eklow : Guitar

Label : No Quarter

Extrait de l'album


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